Son nom vient du grec anti-monis signifiant pas seul en référence au fait qu’il se trouve toujours combiné à un autre élément. Le sulfure d’antimoine, du nom de stibine, était utilisé par les égyptiens pour se maquiller les yeux. C’est lui qui a donné son symbole Sb à l’élément. Actuellement il est principalement utilisé, sous forme d’oxyde, comme retardateur de flamme dans les matières plastiques et sous forme métallique comme élément d’alliage du plomb des batteries.
Numéro atomique | Masse atomique | Configuration électronique | Structure cristalline | Rayon métallique (coordinence 12) |
51 | 121,76 g.mol-1 | [Kr] 4d10 5s2 5p3 | rhomboédrique de paramètres a = 0,4308 nm et c = 1,1247 nm | 159,0 pm |
Masse volumique | Dureté | Température de fusion | Température d’ébullition | Conductibilité électrique | Conductibilité thermique | Solubilité dans l’eau |
6,684 g.cm-3 | 3 | 630,74°C | 1 750°C | 2,88.106 S.m-1 | 24,3 W.m-1.K-1 | insoluble |
Électronégativité de Pauling | pKa : HSbO2/Sb(OH)4– | pKs : SbO(OH) |
1,93 | 11 | 17,1 |
Potentiels standards :
Sb2O5(s) + 6H+ + 4e = 2SbO+ + 3H2O | E° = 0,58 V |
Sb2O5(s) + 4H+ + 4e = Sb2O3(s) + 2H2O | E° = 0,69 V |
SbO3– + H2O + 2e = SbO2– + 2OH– | E° = -0,59 V |
Sb2O4(s) + 4H+ + 2e = 2SbO+ + 2H2O | E° = 0,68 V |
Sb2O3(s) + 6H+ + 6e = 2Sb(s) + 3H2O | E° = 0,15 V |
SbO+ + 2H+ + 3e = Sb(s) + H2O | E° = 0,21 V |
SbO2– + 2H2O + 3e = Sb(s) + 4OH– | E° = -0,67 V |
Données thermodynamiques
Antimoine cristallisé :
|
Antimoine gazeux :
|
La teneur moyenne de l’écorce terrestre est de 0,2 ppm d’antimoine.
L’antimoine, Sb, sous forme sulfurée, Sb2S3 ou Pb2Sb2S5, est présent dans les gisements de minerais sulfurés de plomb, de cuivre, d’argent. C’est souvent un co-produit de la métallurgie de ces métaux.
Minerais : les principaux sont sulfurés, sous forme de stibine Sb2S3, de jamesonite Pb2Sb2S5, de tétraédrite Cu12Sb4S13. Des minerais oxydés, valentinite et senarmontite (Sb2O3) sont également exploités. Les minerais sulfurés exploités en Chine ont une teneur d’environ 2,7 % de Sb.
L’or, l’argent et le mercure accompagnent souvent l’antimoine dans ses minerais. Les producteurs d’or sont parfois également producteurs d’antimoine, comme par exemple les producteurs russes GeoProMining et Polyus.
Carte des gisements d’antimoine, dans le monde.
En 2019. Monde : 160 000 t.
Chine | 100 000 | Turquie | 3 000 | |
Russie | 30 000 | Australie | 2 000 | |
Tadjikistan | 16 000 | Iran | 600 | |
Bolivie | 3 000 | Kyrgyzstan | 400 | |
Birmanie | 3 000 | Kazakhstan | 300 |
Source : USGS
Il n’y a pas de production minière d’antimoine dans l’Union européenne.
Commerce international : en 2019.
Principaux pays exportateurs sur un total mondial de 84 379 t de minerais et concentrés.
Tadjikistan | 29 366 | Thaïlande | 3 624 | |
Russie | 21 769 | Canada | 3 220 | |
Birmanie | 10 745 | Chine | 2 194 | |
Australie | 8 072 | Bolivie | 1 789 |
Source : ITC
Les exportations du Tadjikistan sont destinées à 93 % à la Chine, 7 % aux Pays Bas.
Principaux pays importateurs sur un total mondial de 91 697 t de minerais et concentrés.
Chine | 62 837 | Thaïlande | 3 889 | |
Vietnam | 10 465 | Oman | 3 324 | |
Inde | 6 831 | Italie | 1 895 |
Source : ITC
Les importations chinoises proviennent à 42 % du Tadjikistan, 30 % de Russie, 11 % d’Australie, 11 % de Birmanie.
Réserves : en 2019. Monde : 1 500 000 tonnes.
Chine | 480 000 | Turquie | 100 000 | |
Russie | 350 000 | États-Unis | 60 000 | |
Bolivie | 310 000 | Tadjikistan | 50 000 | |
Australie | 140 000 | Pakistan | 26 000 |
Source : USGS
Les réserves chinoises sont principalement situées dans la province du Hunan.
Les minerais sulfurés sont traités, après broyage, principalement par flottation, avec un taux de récupération de 80 à 95 % et l’obtention de concentrés renfermant de 60 à 68 % d’antimoine.
Les minerais oxydés sont concentrés à l’aide de méthodes gravimétrique, par exemple avec des tables à secousses ou des spirales, le taux de récupération étant d’environ 50 % en donnant des concentrés renfermant de 25 à 40 % d’antimoine.
Les concentrés miniers sont ensuite traités par pyrométallurgie ou par hydrométallurgie.
Traitements pyrométallurgiques : le choix du procédé dépend principalement de la teneur en antimoine des concentrés.
Les concentrés titrant entre 5 et 25 % de Sb subissent un grillage, vers 1000°C, donnant de l’oxyde brut volatil selon la réaction :
Sb2S3 + 9/2 O2(g) = Sb2O3(g) + 3 SO2(g)
L’oxyde est récupéré dans les gaz de combustion. L’apport en dioxygène ne doit pas être trop important afin d’éviter la formation de tétraoxyde Sb2O4 non volatil. La qualité de l’oxyde obtenu dépend des conditions de grillage. L’oxyde peut être commercialisé dans cet état mais, en général, il est purifié soit directement soit en passant par la formation du métal.
La réduction de l’oxyde, en présence de charbon générant du monoxyde de carbone, est réalisée dans un four réverbère, vers 1200°C, selon la réaction :
Sb2O3 + 3 CO = 2 Sb + 3 CO2
Les concentrés titrant entre 25 et 40 % de Sb sont réduits dans un haut fourneau, entre 1200 et 1400°C. En présence d’air, une partie du sulfure est transformée en oxyde par grillage et ce dernier réagit avec le sulfure restant selon la réaction :
2 Sb2O3 + Sb2S3 = 6 Sb + 3 SO2
Les concentrés riches en antimoine, avec des teneurs supérieures à 45 % peuvent subir une liquation, en atmosphère réductrice pour éviter l’oxydation de l’antimoine et à une température comprise entre 550 et 600°C, entre les températures de fusion et d’évaporation du sulfure. Le sulfure liquide est ainsi extrait du concentré et récupéré pour subir l’opération de réduction en métal. Celle-ci peut être réalisée, à l’état fondu, à l’aide de fer selon la réaction :
Sb2S3 + 3 Fe = 2 Sb + 3 FeS
Dans tous les cas le métal obtenu est, en grande partie, transformé, par oxydation, à 1000°C, par de l’air comprimé, en trioxyde (Sb2O3) purifié selon la réaction :
2 Sb + 3/2 O2 = Sb2O3
Les concentrés les plus riches, avec une teneur supérieure à 50 % de Sb, peuvent subir d’abord un grillage transformant le sulfure en oxyde, puis une réduction à l’aide de coke.
Traitements hydrométallurgiques : ils comportent une première étape de lixiviation permettant d’extraire l’antimoine du concentré minier et une seconde étape de réduction par électrolyse.
Le principal solvant de lixiviation est une solution de sulfure et d’hydroxyde de sodium, en présence de soufre. On obtient une solution de thioantimoniate de sodium (Na3SbS4) puis, une électrolyse permet de recueillir l’antimoine sur la cathode avec une pureté qui peut atteindre 99,5 %.
Formes de commercialisation :
Le trioxyde d’antimoine (Sb2O3 ou ATO) représente 60 % de la production d’antimoine, l’antimoine métallique, appelé régule, 36 % (environ une moitié sous forme de métal et une autre moitié allié au plomb), l’antimoniate de sodium (NaSbO3), 4 %. Ce dernier est principalement utilisé par les industries verrières et céramiques.
En 2016, la production mondiale de trioxyde d’antimoine est d’environ 130 000 t/an.
La production d’oxydes raffinés est mieux répartie dans le monde que celle de l’oxyde brut avec, en particulier, une production européenne importante à partir d’oxydes bruts ou de métal importés. En 2018, la production de trioxyde d’antimoine dans l’Union européenne a été de 33 114 t dont 15 845 t, en France, en 2017.
Commerce international d’antimoine brut et de poudre : en 2019.
Principaux pays exportateurs sur un total mondial de 34 323 t.
Chine | 12 952 | Pays Bas | 1 952 | |
Vietnam | 8 844 | Corée du Sud | 1 508 | |
Inde | 2 173 | Birmanie | 1 464 |
Source : ITC
Les exportations chinoises sont destinées à 18 % à la Corée du Sud, 18 % à la Belgique, 15 % au Japon, 12 % aux Pays Bas.
Principaux pays importateurs sur un total mondial de 42 396 t.
Belgique | 8 137 | Espagne | 2 311 | |
France | 6 206 | Pays Bas | 1 760 | |
États-Unis | 6 026 | Chine | 1 658 | |
Japon | 5 027 | Inde | 1 350 | |
Corée du Sud | 3 800 | Thaïlande | 1 309 |
Source : ITC
Les importations belges proviennent à 42 % de Chine, 33 % du Vietnam, 11 % du Tadjikistan.
Producteurs :
L’antimoine contenu dans les alliages est très bien recyclé, en particulier celui des alliages Pb-Sb utilisés dans les accumulateurs au plomb. Toutefois, cette récupération est en constante diminution avec la substitution de l’antimoine par d’autres éléments dans les plaques de batteries.
L’antimoine recyclé représente, en 2010, dans le monde, 56 % de la consommation d’antimoine pour l’élaboration des alliages de plomb.
En Europe, Campine, est une importante société qui recycle l’antimoine des batteries usagées, à Beerse, en Belgique, avec une production d’antimoine recyclé donnant 12 000 t/an de trioxyde à côté de 64 300 t de plomb.
Le groupe Recylex issu de la fusion de Preussag (Allemagne) et Peñarroya (France) exploite, en France, 2 centres de récupération de batteries, à Escandoeuvre (59) et Villefranche-sur-Saône (69). Le polypropylène est récupéré à Villefranche-sur-Saöne et le métal envoyé principalement à Nordenham, en Allemagne. Ainsi, Recylex a récupéré, en 2019, 105 260 t de plomb et 12 500 t de polypropylène à côté de l’antimoine.
Dans les autres utilisations, retardateur de flamme, verres, céramiques, l’antimoine est trop dispersé pour envisager, pour l’instant, une récupération.
En 2019, le taux de recyclage mondial est de 20 %. Aux États Unis, il est de 14 %.
En 2019.
Minerai : en France, la stibine (Sb2S3) était exploitée depuis le XVIIIème siècle. De 1890 à 1908, la France a occupé le premier rang mondial des producteurs miniers et la métallurgie de l’antimoine a pris son essor au début du XXème siècle. La production minière française commença à décliner à partir de cette date pour cesser en 1935, malgré quelques brèves tentatives d’exploitation jusqu’en 1991 : Ouche dans le Massif Central à la fin des années 1970, Ty Gardien en Bretagne, Les Brouzils en Vendée en 1991.
Jusqu’en 1991, la production française cumulée a été de 130 000 t, principalement dans les mines de La Lucette (53), Brioude (43), Massiac (15), Les Brouzils et Rochetréjoux (85).
Entre 1905 et 1934, la production de la mine de La Lucette (53) a été de 42 000 t d’antimoine et de 8 700 kg d’or. En 1908, la mine de La Lucette assurait 1/4 de la production mondiale.
Bien que des ressources existent, toutefois dispersées, il n’y a pas actuellement de production minière en France.
Métal :
Oxydes :
Production : 15 845 t en 2017.
Producteurs :
Commerce extérieur :
Consommations : en 2016, comptée en Sb, la consommation mondiale, y compris Sb recyclé, est de 188 000 t, dont la moitié en Asie et, en 2018, 29 000 t aux États-Unis.
Secteurs d’utilisation : en 2018, dans le monde.
Retardateurs de flamme | 48 % | Autres métallurgies | 6 % | |
Batteries | 34 % | Verres | 2 % | |
Plastiques | 8 % | Céramiques | 1 % |
Source : Roskill
Aux États-Unis, en 2019, la consommation sous forme de métal représente 39 % des utilisations, les emplois dans les céramiques, verres et polymères, 22 % et comme retardateur de flammes, 40 %.
Sous forme métallique :
Élément d’alliage pour améliorer les propriétés mécaniques du plomb, surtout dans les grilles de batteries. Afin d’éviter la consommation d’eau dans les batteries au plomb, les alliages Pb-Sb sont remplacés par des alliages Pb-Ca ou Pb-Sb-Se. Voir le chapitre consacré au plomb.
La teneur des batteries en antimoine est, en 2011, de 5 kg/t aux États-Unis et de 12 kg/t en Europe.
En 2011, la consommation mondiale de batteries a été de 406 millions d’unités SLI (pour véhicules non électriques) et 40 millions d’unités pour véhicules électriques et applications industrielles. Pour les batteries SLI, la teneur en antimoine est de 0,6 % soit 0,09 kg par batterie et au total une consommation de 36 024 t. Pour les autres types de batteries, la teneur est de 1,5 % de Sb soit 0,45 kg par batterie et une consommation totale de 17 607 t.
Sous forme d’oxyde (Sb2O3 ou ATO) : en 2013, la consommation mondiale est de 130 000 t.
L’oxyde d’antimoine est un retardateur de flamme lorsqu’il est associé aux composés organiques chlorés et bromés présents ou ajoutés dans les matières plastiques et les élastomères utilisés dans le bâtiment, les automobiles, les câbles…. Par exemple, le PVC peut contenir de 3 à 20 % d’oxyde d’antimoine selon les applications alors que les caoutchoucs et élastomères peuvent en contenir jusqu’à 30 %.
Pour l’utilisation dans les matières plastiques, l’oxyde peut être utilisé sous la forme de mélanges-maîtres (oxyde d’antimoine et matrice polymère) qui contiennent jusqu’à 90 % de Sb2O3. Les mélanges-maîtres peuvent également contenir d’autres adjuvants (tels que les composés organiques chlorés et bromés), dans ce cas, la teneur en oxyde est plus faible.
Le trioxyde est aussi employé comme catalyseur de polymérisation du PET et comme stabilisant du PVC. La teneur du PET en antimoine est comprise entre 150 et 250 mg/kg. La diffusion de cet antimoine par exemple dans l’eau de boisson contenue dans les bouteilles en PET est, dans des conditions normales d’utilisation, limitée et reste en deçà de la teneur limite dans l’Union européenne de 5 µg/L.
Autres utilisations de l’oxyde : peintures, émaux et céramiques comme opacifiant, verre comme décolorant, pigments, fibres et films polyester.
Autres formes d’utilisation :