Les terres rares ou lanthanides sont des éléments qui possèdent des propriétés chimiques très proches. Pour cette raison les données industrielles ne sont que partiellement détaillées par élément et sont principalement regroupées dans le produit terres rares. Aux terres rares, sont associés, le scandium et l’yttrium. Dénommés terres rares, ces éléments ne sont pas rares et se présentent commercialement sous forme d’oxydes, de sels ou de métaux, les éléments étant séparés ou pas. Ils possèdent des propriétés optiques et magnétiques originales qui ont permis le développement de leur utilisation en particulier comme luminophores ou dans des aimants par exemple pour des éoliennes.
Les terres rares représentent le groupe des lanthanides (éléments de numéros atomiques compris entre 57 et 71, du lanthane au lutécium) auquel on ajoute, du fait de propriétés chimiques voisines (même colonne de la classification périodique), l’yttrium (Y) et le scandium (Sc). On distingue les terres cériques, légères (lanthane, cérium, praséodyme, néodyme, samarium, europium et gadolinium) des terres yttriques, plus lourdes (les autres terres rares), l’europium et le gadolinium étant parfois classés comme terres rares lourdes.
Malgré leur nom, les éléments constituant les terres rares ne sont pas rares. Le plus abondant, le cérium, est plus répandu dans l’écorce terrestre que le cuivre, le plus rare, le thulium, est 4 fois plus abondant que l’argent (voir le tableau ci-dessous). Les teneurs sont, en général, exprimées sous forme d’oxydes.
La teneur de l’écorce terrestre en terres rares, notées TR, est d’environ 0,08 %, voir le tableau ci-dessous pour plus de détails.
Le prométhium (Pm), radioactif (période de 147Pm = 2,62 ans), n’existe pas à l’état naturel. Il apparaît comme isotope instable dans les produits de fission de l’uranium.
Les teneurs des minerais en scandium sont toujours très faibles : quelques ppm à quelques dizaines de ppm. Souvent, le thorium et l’uranium, radioactifs, sont associés aux terres rares ce qui entraîne des difficultés d’exploitation et, en particulier en Chine, de nombreuses pollutions.
Les principaux minerais sont la bastnaésite et la monazite.
Bastnaésite : c’est un fluorocarbonate, (TR)FCO3, à forte teneur en terres cériques et, relativement, en europium. Exploitée en Chine, co-produit d’une mine de fer, à Bayan Obo, en Mongolie Intérieure et aux États-Unis, à Mountain Pass, dans le comté de San Bernardino, en Californie.
Monazite : c’est un orthophosphate de terres rares et de thorium, (TR,Th)PO4. C’est également le principal minerai de thorium. C’est souvent un sous-produit du traitement de l’ilménite (minerai de titane), exploitée dans les sables de plages, en Australie, Inde, Brésil, Malaisie… Le minerai est enrichi, à environ 60 %, par séparation magnétique. Avant l’exploitation du gisement de Mountain Pass, aux États-Unis, c’était la principale source de terres rares et pendant longtemps, jusqu’au développement de la production chinoise, l’Australie a été un important producteur à partir de monazite.
Xénotime : c’est un orthophosphate de terres yttriques, renfermant des teneurs d’environ 55 % d’oxydes de terres rares. C’est, en Malaisie, un sous-produit du traitement de la cassitérite (minerai d’étain). Parmi les terres rares, la part de l’Yttrium peut atteindre 60 %.
Loparite : c’est un niobiotitanate de terres rares présent en Russie, dans la péninsule de Kola. Le minerai exploité par Solikamsk Magnesium Works, filiale du groupe Uralkali, renferme de 28 à 30 % d’oxydes de terres rares, de 35 à 38 % de dioxyde de titane, de 7,5 à 8 % d’oxyde de niobium, de 0,5 à 0,8 % d’oxyde de tantale. Les concentrés obtenus titrent environ 32 % de terres rares, surtout cériques. Ils sont traités en partie sur place et en partie exportés à Sillamäe, en Estonie, dans l’usine de Neo Performance Materials pour séparer les terres rares. En 2019, la production a été de 9 472 t de loparite qui ont donné 2 620 t d’oxydes de terres rares, 1 946 t de titane dans de l’éponge de titane et du tétrachlorure, 659 t d’oxyde de niobium et 31,6 t d’oxyde de tantale.
Minerais phosphatés : l’apatite de Kola, en Russie, renferme de l’ordre de 1 % de terres rares qui sont récupérées, à Veliky Novgorod par la société Acrom, lors de la transformation de cette apatite en engrais phosphaté. En 2019, la production a été de 70,5 t d’oxydes de TR.
Argiles : appelées minerais ioniques, certaines argiles exploitées dans le Sud-Est de la Chine, à Ganzhou, Xunwu, Longnan, dans la province de Jiangxi, Caowu dans la province de Guangdong, Hezhou dans celle du Guangxi, Jianghua dans celle du Hunan, renferment de 0,05 à 0,33 % d’oxydes de terres rares sous forme d’ions adsorbés qui sont récupérés par lixiviation in situ à l’aide de solutions de sulfate d’ammonium. Souvent exploitées de façon artisanale, elles sont la principale source de la production chinoise illégale. Après purification de la solution, les terres rares sont précipitées à l’aide d’acide oxalique sous forme d’oxalates. Elles renferment très peu de cérium, des teneurs élevées en europium et des teneurs très variables en yttrium. C’est la principale source mondiale de terres yttriques avec environ 95 % de la production mondiale. Les réserves de la province de Jiangxi sont estimées à 15,6 millions de t d’oxydes de terres rares dont 2,13 millions de t de terres yttriques.
Lujavrite : c’est une variété de syénite néphélinique, silicoaluminate ne renfermant pas de quartz, qui a été enrichie en divers éléments dont des terres rares. Cette roche est présente dans le gisement de Kvanefjeld, au sud du Groenland, dont l’exploitation est en cours de préparation. La mine est propriété de Greenland Minerals, joint venture pilotée par le groupe chinois Shenghe Resources. Les réserves prouvées et probables sont de 108 millions de t de minerai renfermant 2 600 ppm de Zn, 362 ppm de U3O8 et 14 300 ppm d’oxydes de terres rares. La production prévue est de 16 000 t/an de fluorure de calcium, 6 000 t/an de concentré de zinc, 454 t/an de U3O8, 19 000 t/an d’oxyde de La et Ce ainsi que 3 860 t/an d’oxyde de Nd, 1 224 t/an d’oxyde de Pr, 30 t/an d’oxyde de Eu, 40 t/an d’oxyde de Tb, 237 t/an d’oxyde de Dy. Les concentrés de terres rares produits, renfermant 20 à 25 % d’oxyde de TR, doivent être traités en Chine pour séparer les terres rares. Les terres rares devraient représenter 80 % des revenus du projet.
Oxydes de TR, Sc, Th et U | Formule | Teneur de l’écorce terrestre, en ppm | Concentrés miniers (teneurs* en %) | Concentrés chimiques (teneurs* en %) | Prix des oxydes, en $/kg, 99,5 % de pureté, en juin 2020 |
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Monazite | Bastnaésite | Loparite | Bayan Obo (Chine) | Mountain Pass (États -Unis) |
Mount Weld (Australie) |
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Total oxyde de TR | – | 150 | ∼ 60 | 60-70 | ∼ 32 | 100 | 100 | 100 | ||
Lanthane | La2O3 | 18 | 24 | 32 | 28 | La2O3 | 23,0 | 34,0 | 23,88 | 3,451 |
Cérium | CeO2 | 46 | 46 | 49 | 57 | CeO2 | 50,0 | 48,8 | 47,55 | 1,704 |
Praséodyme | Pr6O11 | 5,5 | 5 | 4 | 4 | Pr6O11 | 6,2 | 4,2 | 5,16 | 41,30 |
Néodyme | Nd2O3 | 24 | 17 | 13,5 | 9 | Nd2O3 | 18,5 | 11,7 | 18,13 | 42,41 |
Samarium | Sm2O3 | 6,5 | 2,5 | 0,5 | 0,9 | Sm2O3 | 0,8 | 0,79 | 2,44 | 1,781 |
Europium | Eu2O3 | 0,5 | 0,05 | 0,1 | 0,1 | Eu2O3 | 0,2 | 0,13 | 0,53 | 30,003 |
Gadolinium | Gd2O3 | 6,4 | 1,5 | 0,3 | 0,2 | Gd2O3 | 0,7 | 0,21 | 1,09 | 25,73 |
Terbium | Tb4O7 | 0,9 | 0,04 | 0,01 | 0,07 | Tb4O7 | 0,1 | 0,09 | 6422 | |
Dysprosium | Dy2O3 | 5 | 0,7 | 0,03 | 0,09 | Dy2O3 | 0,1 | 0,25 | 272 | |
Holmium | Ho2O3 | 1,2 | 0,05 | 0,01 | 0,03 | Ho2O3 | – | 0,03 | 58,23 | |
Erbium | Er2O3 | 4 | 0,2 | 0,01 | 0,07 | Er2O3 | – | 0,06 | 22,30 | |
Thulium | Tm2O3 | 0,4 | 0,01 | 0,02 | 0,07 | Tm2O3 | – | 0,01 | ||
Ytterbium | Yb2O3 | 2,7 | 0,1 | 0,01 | 0,3 | Yb2O3 | – | 0,03 | 14,812 | |
Lutécium | Lu2O3 | 0,8 | 0,04 | 0,01 | 0,05 | Lu2O3 | – | 0 | 6182 | |
Scandium | Sc2O3 | 16 | Sc2O3 | 9772 | ||||||
Yttrium | Y2O3 | 28 | 2,4 | 0,1 | 0,15 | Y2O3 | – | 0,12 | 0,76 | 2,903 |
Thorium | ThO2 | 10 | 6,7 | 0,35 | 0,65 | ThO2 | 0,032 | – | – | – |
Uranium | U3O8 | 4 | 0,3 | < 0,05 | U3O8 |
En 2019, dans le monde : 210 000 t d’oxydes de terres rares.
Chine | 132 000 t | Russie | 2 700 t | |
États-Unis | 26 000 t | Madagascar | 2 000 t | |
Birmanie | 22 000 t | Thaïlande | 1 800 t | |
Australie | 21 000 t | Brésil | 1 000 t | |
Inde | 3 000 | Vietnam | 900 t |
Commerce international :
En 2018, les exportations chinoises ont été de 33 700 t d’oxydes de TR, 5 700 t sous forme métallique et les importations de 41 400 t d’oxyde. Ces dernières correspondent aux concentrés américains ou australiens importés pour séparation des différentes TR.
En 2018, les exportations d’oxydes étaient destinées à 34 % pour l’Europe, 27 % pour les États-Unis, 19 % le Japon.
En 2018, les exportations de métaux étaient destinées à 63 % pour le Japon, 21 % l’Europe, 4 % les États-Unis.
En 2019, les importations de États-Unis ont été de 14 000 t de composés de TR, 310 t de ferrocérium et de 590 t de métaux de TR. Les exportations ont été de 26 000 t de concentrés miniers et de composés d’oxydes de TR (la production de Mountain Pass exportée pour séparations en Chine), 1 400 t de ferrocérium et de 100 t de métaux de TR.
Production par élément en 2015, sur un total de 170 000 t. Répartition par élément :
Ce | La | Nd | Y | Pr | Sm | Dy | Autres |
32 % | 27 % | 19 % | 9 % | 6 % | 2 % | 2 % | 3 % |
Évolution de la production minière mondiale : en tonnes.
1985 | 1990 | 1994 | 1998 | 2000 | 2005 | 2010 | 2013 | 2016 | 2019 | |
États-Unis | 13 428 | 22 700 | 20 700 | 5 000 | 5 000 | 0 | 0 | 4 000 | 0 | 26 000 |
Chine (officielle) | 8 500 | 16 500 | 23 000 | 60 000 | 73 000 | 119 000 | 120 000 | 93 800 | 105 000 | 132 000 |
Australie | 10 304 | 6 050 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 2 000 | 16 000 | 21 000 |
Russie | – | 8 500 | 6 000 | 2 000 | 2 000 | – | – | 2 400 | 3 800 | 2 700 |
Production d’yttrium : en 2013, dans le monde : 7 100 t d’oxyde :
Chine | 7 000 t | Brésil | 15 t | |
Inde | 56 t | États-Unis | 5 t | |
Australie | 15 t | Malaisie | 2 t |
Production de scandium : dans le monde, de 10 à 15 t/an d’oxyde comme co-produit, principalement en :
Réserves de terres rares : en 2019, dans le monde : 120 millions de t exprimées en oxydes, principalement dans des minerais de bastnaésite et de monazite :
Chine | 44 000 | Inde | 6 900 | |
Brésil | 22 000 | Australie | 3 300 | |
Vietnam | 22 000 | Groenland | 1 500 | |
Russie | 12 000 | États-Unis | 1 400 |
Des gisements de terres rares sont connus dans 34 pays.
Réserves d’yttrium : en 2013, dans le monde : 540 000 t exprimées en oxyde.
Chine | 220 000 t | Inde | 72 000 t | |
États-Unis | 120 000 t | Malaisie | 13 000 t | |
Australie | 100 000 t | Brésil | 2 200 t |
De l’ordre de 75 à 80 % du tonnage des terres rares est consommé sans séparation des terres rares contenues dans les concentrés marchands. Ces utilisations mettent, en général, en jeu les propriétés chimiques des terres rares. Ces propriétés étant très voisines, il n’est pas nécessaire de séparer les terres rares.
Les terres rares non séparées se trouvent sous forme d’oxydes, d’hydroxydes, de carbonates, de fluorures, de chlorures ou de nitrates, les teneurs des différentes terres rares étant celles du minerai. Les différents sels sont obtenus par attaque acide, ou à l’aide d’hydroxyde de sodium, des concentrés marchands, l’oxyde étant obtenu ensuite, par calcination.
Le mélange des métaux de terres rares, appelé mischmétal, est obtenu par électrolyse en sel fondu de terres cériques. Un bain de chlorures de terres rares, additionné de chlorures alcalins et alcalino-terreux, est fondu à 800-1000°C. Le creuset, en acier, sert de cathode, l’anode est en graphite. La composition du mischmétal dépend du minerai ou du mélange de minerais utilisé. Elle est d’environ 50 % en cérium, 25 % en lanthane, 17 % en néodyme, le reste représentant les divers autres lanthanides (voir tableau).
Pierres à briquet : elles sont en ferrocérium, alliage de mischmétal avec 25 à 30 % de fer. Le fort pouvoir réducteur des terres rares est utilisé dans cette application : les terres rares sont pyrophoriques (les fines particules arrachées par abrasion s’enflamment à l’air). Cette application est fortement concurrencée par les briquets à allumage piézo-électrique.
Métallurgie : utilise les métaux de terres rares pour désoxyder et désulfurer l’acier (les métaux de terres rares sont très réducteurs). Ils permettent également, sous forme d’ajout de mischmétal ou de son siliciure, à des teneurs de 0,1 à 0,2 %, la sphéroïsation du graphite dans la fonte nodulaire. Un tiers des terres rares produites en Chine est utilisé dans ces applications.
Catalyse : les terres rares jouent un rôle de promoteur dans des zéolithes utilisées comme catalyseur dans le craquage des produits pétroliers.
Toute la difficulté de la séparation, entre-elles, des terres rares réside dans leur similitude de propriétés chimiques. Des terres rares ne possèdent qu’un nombre d’oxydation (III). Quelques unes peuvent présenter deux nombres d’oxydation différents III et IV pour Ce, Pr, Tb ou II et III pour Eu, Sm et Yb. Pour le cérium et l’europium, cela est exploité pour leur récupération, à partir d’un mélange de terres rares en solution.
Le cérium est oxydé de CeIII en CeIV à l’air à chaud, ou en solution, à l’aide de peroxyde d’hydrogène à pH 4, puis précipité sélectivement en oxyde de cérium hydraté (CeO2,2H2O).
L’europium est réduit de EuIII en EuII par un amalgame de zinc ou par électrolyse puis est précipité sélectivement sous forme de sulfate.
Jusqu’en 1981, la société américaine Molycorp ne retirait du minerai de bastnaésite de Mountain Pass que ces deux terres rares. De 1981 à 2002, elle a récupéré également Sm et Gd. Le procédé utilisé consistait à oxyder le cérium du concentré de bastnaésite par calcination (à l’air), à 650°C, pendant 3 h, puis à dissoudre sélectivement, à l’aide de HCl, les terres rares trivalentes (toutes sauf le cérium après son oxydation). Le résidu, après calcination, qui contenait environ 70 % de CeO2 était utilisé directement. A partir de la solution de chlorures de terres rares, après extraction par solvant, à l’aide d’acide di(2-éthylhexyl) phosphorique (HDEHP ou D2 EHPA ou DEPA), l’oxyde d’europium très pur était obtenu.
Industries du verre et des céramiques :
Manchons incandescents : c’est la première utilisation des terres rares, en 1891, par Carl Auer von Welsbach (chimiste autrichien) qui a mis au point un manchon incandescent permettant l’éclairage (par candoluminescence) par le gaz de ville. Cette technique est toujours utilisée dans l’éclairage de camping, au gaz. Le manchon de coton ou de soie artificielle est trempé dans une solution aqueuse de nitrates de thorium et de cérium, puis séché. Lors du premier chauffage, la fibre brûle et les nitrates sont transformés en oxydes. La composition est de 99 % de ThO2 et 1 % de CeO2. A la mort de von Welsbach, en 1929, environ 5 milliards de manchons avaient été produits, dans le monde. Actuellement, la fabrication et la commercialisation de manchons incandescents renfermant du thorium sont interdites en France. Le thorium est remplacé par de l’oxyde d’yttrium ou de zirconium avec toutefois une efficacité moindre.
La monazite, minerai de terres rares et de thorium a été d’abord traitée pour récupérer le thorium (et, en partie, le cérium) destiné aux manchons à gaz. Le résidu, les terres rares, était valorisé en métallurgie ou pour la fabrication des pierres à briquet (voir ci-dessus).
Pot catalytique des automobiles : l’existence des 2 degrés d’oxydation du cérium permet aux oxydes de cérium de jouer soit un rôle d’oxydant (CeO2) soit un rôle de réducteur (Ce2O3). Pour fonctionner efficacement, la teneur en dioxygène au niveau du catalyseur de post-combustion doit rester dans les proportions stœchiométriques des réactions de combustion des composés imbrûlés (CO et hydrocarbures). L’oxyde de cérium joue un rôle de régulateur de la teneur en dioxygène. En présence d’un excès de dioxygène, l’oxyde de cérium stocke l’oxygène (Ce2O3 + 1/2O2 = 2CeO2), inversement, quand le dioxygène est en défaut, CeO2 le restitue. Le support du catalyseur (100 à 3000 ppm de Pd, Rh ou Pt) est en alumine avec environ 20 % en masse d’oxyde de cérium. Les qualités réfractaires des oxydes de cérium sont également appréciées dans cette application. Les catalyseurs 3 voies assurent, à 90 %, la conversion de CO en CO2 et des hydrocarbures imbrûlés, en CO2 et H2O.
Additif au carburant diesel : l’ajout au carburant diesel d’un additif (50 g/t) organo-soluble contenant 6 % de cérium, sous forme organométallique, permet d’améliorer la combustion des composés polyaromatiques (cancérigènes) condensés (suies, 300 000 t/an en Europe) émis par les moteurs diesel et ainsi de diminuer la pollution et la fumée noire émise. L’élimination des fumées noires est possible par combustion à 600°C mais cette température n’est pas atteinte par les gaz d’échappement d’un moteur froid et les particules bouchent les filtres destinés à les éliminer. L’ajout de cérium permet d’abaisser la température de combustion de 600 à 200°C et ainsi, de brûler les particules sitôt leur formation. Les autobus d’Athènes, ville dont l’atmosphère est particulièrement polluée, sont équipés pour consommer ce carburant diesel.
Chimie analytique : dosages par oxydo-réduction à l’aide du couple Ce4+/Ce3+ (E° = 1,61 V).
Solvay, utilise un procédé de séparation continu par extraction liquide-liquide à l’aide de solvants.
Le lanthane (à 99,995 % de pureté) est extrait, puis le cérium (à 99,5 %), le didyme (alliage Nd-Pr séparé ensuite en Pr à 98 % et Nd à 95 %), le samarium/europium (séparé ensuite en Sm à 98 % et Eu à 99,99 %), le gadolinium/terbium (séparé ensuite en Gd à 99,99 % et Tb à 99,9 %), et l’ensemble des autres terres rares, l’yttrium étant obtenu, en fin d’extraction, à 99,99 %.
Lors des diverses extractions, réalisées en milieu nitrique, de nombreux types de solvants sont employés : acide di(2-ethylhexyl)phosphorique, tri(n-butyl)phosphate, sels d’ammonium quaternaire, acides carboxyliques… Dans l’usine de La Rochelle, plus de 1 100 étages de mélangeurs-décanteurs sont utilisés.
Les terres rares séparées sont livrées sous forme d’oxyde ou de sels, les puretés étant, en général, exprimées en masse par rapport aux autres terres rares, sans tenir compte des autres impuretés éventuellement présentes.
Les métaux et particulièrement le néodyme, l’yttrium et le terbium, sont préparés par calciothermie, à plus de 1 000°C, à partir du fluorure dans le cas du néodyme selon la réaction :
2NdF3 + 3 Ca = 2Nd + 3CaF2
Le samarium est préparé par réduction de l’oxyde par le lanthane ou le mischmétal, le métal, qui possède une tension de vapeur élevée, étant séparé par distillation sous vide.
Ces opérations métallurgiques sont réalisées principalement en Chine.
Jusqu’en 1994, Rhodia importait de la monazite d’Australie qui renfermait de l’uranium et du thorium. La monazite, après broyage, était attaquée par de la soude à 60 % en masse, à 180°C, en autoclave, pendant environ 3 heures. Le phosphate trisodique (Na3PO4) formé, soluble, était éliminé à l’aide d’eau chaude et les hydroxydes de terres rares et de thorium, après filtration et lavage, étaient mis en solution dans de l’acide nitrique. Une première séparation terres rares/thorium-uranium/impuretés était effectuée par des batteries d’extraction liquide-liquide. Du nitrate de thorium (à 99,9 %) et du nitrate d’uranium étaient produits lors de cette 1ère séparation. L’uranium était vendu et le thorium stocké, avec en 2016, un stock de 7 000 t de thorium sous forme de nitrate (10 000 t) et d’hydroxyde brut (21 700 t). Les effluents, radioactifs, étaient traités et les résidus stockés. Ces déchets, faiblement radioactifs, étaient stockés sur les sites de l’ANDRA (voir le chapitre uranium). Devant les difficultés rencontrées pour stocker ces déchets, Rhodia devenu Solvay a modifié son approvisionnement. La bastnaésite, est prétraitée sur les lieux d’extraction (Bayan Oba, en Chine) et la monazite australienne est prétraitée, en Malaisie, avant extraction des terres rares à La Rochelle (17).
Elles font, en général, appel aux propriétés physiques des terres rares.
Les propriétés remarquables des terres rares dans ce domaine sont liées à leur configuration électronique. Les niveaux électroniques 5p et 5s, saturés, font écran au niveau 4f, comme une cage de Faraday, ce qui explique la quasi-insensibilité du niveau 4f aux effets du champ cristallin. En conséquence, les transitions électroniques, f–>f, se produisent entre niveaux discrets, comme dans l’ion libre (l’élargissement des niveaux par effet du champ cristallin disparaît), et les absorptions ou émissions de lumière sont quasi monochromatiques.
Les terres rares sont utilisées comme luminophores, substances qui, sous l’effet d’une excitation extérieure, émettent de la lumière (phénomène de luminescence). On peut considérer qu’il existe toujours une terre rare qui réponde à un problème de luminescence donné et, en particulier, tout le spectre visible peut être couvert. L’europium est, en particulier, utilisé dans la protection des billets de banque.
Catholuminescence : dans les téléviseurs LCD et plasma, les couleurs sont obtenues à l’aide de terres rares. Pour la couleur rouge, de l’europium trivalent, qui émet à 612 nm, est dilué dans une matrice d’oxyde ou oxysulfure d’yttrium (Y2O2S), qui n’a pas de propriété de luminescence propre ou de borate d’yttrium et gadolinium (Y0,65Gd0,35)BO3. Le bleu est obtenu à l’aide d’europium II dans une matrice d’aluminate BaMgAl10O17, le vert par le terbium III dans une matrice YGdBO3.
Radioluminescence : dans le domaine des rayonnements de hautes énergies (rayons X, gamma, particules alpha, bêta, neutrons…), dans un but de radiographie ou de dosimétrie. En particulier, en radiographie médicale, les terres rares sont utilisées dans les écrans renforçateurs de rayons X, à la place du tungstate de calcium (CaWO4), ce qui a permis de réduire considérablement, pour les patients, les doses d’irradiation. Le film photosensible est, en sandwich, entre 2 écrans luminescents, dans lesquels sont dispersés des luminophores à base de terres rares (Tb3+ dans Gd2O2S, Tm3+ dans LaOBr, Nb3+ ou Tm3+ dans YTaO4). Le rayonnement X est transformé en rayonnements bleu ou vert pour lesquels les émulsions photographiques sont nettement plus sensibles.
Photostockage : l’europium, dans une matrice de carbonate de strontium et d’oxyde métallique, permet à la poudre ainsi fabriquée d’émettre une lumière visible pendant plus de 10 heures après une irradiation de 10 minutes. Mélangée à de l’encre, de la peinture, des plastiques, elle remplace le prométhium, radioactif.
Fluorescence : les lampes fluorescentes, renferment, en fonctionnement, de la vapeur de mercure à basse pression qui permet d’exciter le revêtement luminophore qui contient pour les lampes fluo-compactes, en masse, 69,2 % d’oxyde d’yttrium, 11 % d’oxyde de cérium, 8,5 % d’oxyde de lanthane, 4,9 % d’oxyde d’europium, 4,6 % d’oxyde de terbium. Les lampes trichromatiques utilisées dans l’éclairage familial font intervenir :
Dans le cas des lampes à vapeur de mercure à haute pression, qui n’émettent pas dans le rouge, un dépôt interne de luminophore Eu3+ dans du vanadate d’yttrium (YVO4), est excité par la partie UV du spectre de décharge du mercure (entre 220 et 310 nm) et émet dans le rouge à 620 et 700 nm. Les grains de luminophore ont environ 5 µm de diamètre.
Dans ce domaine d’application, les lampes fluorescentes sont supplantées par les LED.
Lasers : dans ce cas, les centres actifs sont forcés à émettre dans une seule direction. Dans les lasers YAG, qui émettent principalement à 1,064 µm, Nd3+ est utilisé dans un grenat d’yttrium (Y3Al5O12). Nd3+ est également utilisé dans un verre (laser Nd-verre).
Les terres rares ont des propriétés magnétiques exceptionnelles, malheureusement, en dessous de la température ambiante. Le point de Curie le plus élevé est celui du gadolinium, à 20°C. A la température ambiante, les terres rares sont paramagnétiques ou diamagnétiques.
Elles concernent les domaines suivants :
Le scandium est principalement utilisé, à des teneurs de 0,1 à 0,5 %, dans des alliages d’aluminium destinés à des applications dans l’industrie aérospatiale et le sport. A des teneurs pouvant atteindre 2 % il a été utilisé, en Russie, pour la production des Mig 21 et 29. Il est également employé dans des lampes halogènes sous forme d’iodure de scandium afin d’obtenir une lumière proche de celle d’une source naturelle.
En 2015, il est estimé à 1 % de la consommation, principalement à partir de chutes de fabrication.
En Chine, 80 % des capacité de recyclage sont installées à Ganzhou, dans la province du Jiangxi. La production est de 15 000 t/an, à 90 % d’oxyde de Nd et Pr et à 10 % d’oxydes de Tb et Dy.
En France, la société Ecosystem a récupéré, en 2019, 5 176 t de lampes soit plus de 50 millions d’unités en vue du recyclage des matériaux contenu (88 % de verre, 5 % de métal, 4 % de plastique, 3 % de poudre luminophore, 0,005 % de mercure). 4 000 t de lampes sont susceptibles de donner 15 t d’yttrium, 1 t de terbium et 1 t d’europium. Entre 2012 et 2016, Solvay, a récupéré à Saint-Fons (69) la poudre luminescente de ces lampes, éliminé les résidus de verre et le mercure, et produit un concentré de terre rare renfermant du lanthane, du cérium, du terbium, de l’yttrium, de l’europium et du gadolinium puis séparé ces différentes terres rares à La Rochelle (17). Cette activité a été abandonnée par Solvay fin 2016.
Les groupes Umicore et Solvay, se sont associés pour recycler les batteries Ni-M-H. Les batteries seront traitées par Umicore à Hoboken afin de séparer le nickel des terres rares et le concentré de terres rares obtenu serait traité par Solvay à La Rochelle pour séparer les terres rares.
En 2019.
Production : pas de production minière.
Production de terres rares séparées, par Solvay, depuis 1948, à La Rochelle (17), à l’origine pour donner des pierres à briquet. La capacité de production est de 6 000 t/an.
Solvay exploite 4 autres usines dans le monde, 2 en Chine avec les joint-ventures, Baotou Solvay Rare Earth Co. et Liyang Solvay Rare Earth New Materials Co., une au Japon, Anan Kasei, en association avec Santoku et une aux États-Unis.
Solvay produit l’ensemble des terres rares avec en particulier la production de luminophores pour lampes fluocompactes et écrans, d’additif pour carburant diesel afin de régénérer les filtres à particules, avec 3 millions de véhicules équipés dans la monde, de produits pour les pots catalytiques automobiles, de poudre pour polissage d’écrans LCD, de condensateurs céramiques pour applications électroniques.
Dans l’usine de La Rochelle, Solvay a recyclé des terres rares, de 2012 à 2016, à partir de lampes fluorescentes usées.
Commerce extérieur :
Ferrocérium :
Métaux de terres rares :
Composés de terres rares :
Consommations : dans le monde, en 2018 : 165 000 t exprimées en oxydes, à 83 % en Chine, 12 % au Japon, 2 % aux États-Unis.
Consommation, par terre rare, en 2018, sur un total de 165 000 t. Répartition en volume et en valeur :
Ce | La | Nd | Pr | Y | Dy | Eu, Sm, Gd, Tb | |
en volume | 35 % | 30 % | 18 % | 6 % | 7 % | 1 % | 3 % |
en valeur | 4 % | 6 % | 49 % | 20 % | 1 % | 13 % | 7 % |
En volume, en 2017, les deux principales terres rares consommées, Ce et La, représentent 84 000 t alors que les autres terres rares représentent 53 000 t.
Par secteurs d’utilisation, dans le monde, en 2017 et répartition, en 2018, en volume et valeur :
Application | Consommation | % en volume | % en valeur |
Aimants | 51 000 t | 20 % | 73 % |
Catalyse | 30 000 t | 19 % | 4 % |
Batteries | 11 % | 6 % | |
Alliages métalliques | 31 000 t | 7 % | 5 % |
Polissage | 22 000 t | 26 % | 7 % |
Additifs du verre | 9 500 t | ||
Céramiques | 8 500 t | 6 % | 4 % |
Luminophores | 3 000 t | 4 % | 4 % |
Autres | 10 500 t | 7 % | 5 % |
Total | 167 500 t |
Sources : Argus et Alkane Resources
Par élément chimique :
Secteurs d’utilisation, par terre rare, en 2012 : en % d’une application donnée par terre rare.
Lanthane | Cérium | Praséodyme | Néodyme | Samarium | Europium | Gadolinium | Terbium | Dysprosium | Erbium | Yttrium | |
Aimants | 73 % | 89 % | 97 % | 35 % | 24 % | 98 % | |||||
Batterie | 26 % | 3 % | |||||||||
Alliages métalliques | 10 % | 19 % | 2 % | 28 % | |||||||
Catalyseur | 44 % | 13 % | |||||||||
Automobile | 5 % | ||||||||||
Catalyseur raffinage pétrolier | |||||||||||
Polissage du verre | 2 % | 35 % | |||||||||
Céramiques et additif du verre | 6 % | 13 % | 7 % | 5 % | 72 % | 21 % | |||||
Luminophores | 2 % | 4 % | 96 % | 23 % | 71 % | 25 % | 78 % |
Source : Panorama 2014, BRGM